Plongée dans mes archives, suite. La liste des photos que j’ai ratées est trop longue à mon gout, surtout quand ça concerne un document qui aurait pu être exceptionnel, mais ça fait partie des risques du métier…
1982, campagne de Greenpeace contre les déversements de déchets nucléaires à 500 km au large de l’Espagne en plein océan Atlantique. Depuis 1978, les actions d’oppositions à ces pratiques monstrueuses s’enchainent et les photos commencent à se ressembler. Je cherche un nouvel angle.
Je ressors mon Nikonos III, un boitier manuel costaud et étanche, mais difficile à utiliser. En demandant à mon pilote de zodiac de se coller sous une rampe de déversement du cargo poubelle GEM, j’espère faire une image sous-marine inédite. Dans des conditions extrêmes, on arrive enfin à se mettre en position, le cargo avance trop vite, ça tape dans tous les sens. Un fut nous frôle et coule devant moi dans une explosion liquide. J’enfonce mon boitier sous l’eau et déclenche à l’aveugle.
Raté, il parait que la chance sourit aux audacieux, mais ce n’était pas mon jour. Les marins du GEM ayant compris mon intention arrêtent le travail tant que nous restons sous leur rampe. Je n’aurai pas de deuxième chance…
Il ne me reste que cette photo d’un fut coupé par un cadrage défectueux. Il est entouré de bulles d’air et l’on peut apercevoir la coque du GEM. Illustration ratée d’un tonneau contenant des déchets nucléaires au début de sa descente vertigineuse de 5 km vers le fond de cette zone utilisée par les pécheurs galiciens.
Les océans sont le point de départ de notre chaine alimentaire. Depuis 1945, le nombre des cancers double tous les trente ans. Le nucléaire, c’est ça.